Pierre Katuszewski
« Bobo, Gianluca, Nelson : la force spectaculaire de la parole empêchée
Colloque « La parole empêchée »
Il arrive que l’on ne parvienne pas à
exprimer oralement ses pensées, ses sentiments, ses aspirations, ses
souffrances ou ses joies. La parole empêchée est une parole qui ne peut
advenir comme elle le devrait. Mais quels sont les obstacles, externes
ou internes, physiologiques ou mentaux, tacites ou explicites, culturels
ou intimes, conscients ou inconscients, qui interdisent à la bouche
d’articuler, allant parfois jusqu’à paralyser la langue, et à empêcher
les mots de se faire entendre ? Fondamentalement contrariée, captive de
défenses qui l’entravent diversement, que celles-ci la raturent purement
et simplement, la restreignent ou la voilent, la parole empêchée est
contrainte de trouver d’autres voix – celles du regard ou des gestes,
par exemple –, d’emprunter d’autres voies, de la simple maladresse au
discours vicié, vain ou inutile, du propos délivré à contrecœur ou à
contretemps jusqu’au secret. Réfléchir sur les causes et les formes de
cette absence ou défaillance de la parole, sur le fait de se taire, de
ne pas vouloir dire, de ne pas pouvoir dire, de ne pas tout dire ou de
dire de façon détournée, c’est nécessairement réfléchir sur les usages
du langage et les conditions de la communication mais aussi analyser les
échanges qui se produisent entre silence et expression et dont
l’écriture comme l’art portent l’empreinte.
8 avril 2014